Reportage

Les doutes de l’Otan

Chapo

Texte Les doutes de l’Otan

La guerre en Afghanistan signera-t-elle l’arrêt de mort de l’Otan ? Tandis que les pays membres rechignent de plus en plus à envoyer des troupes dans ces montagnes qui ont toujours découragé les invasions, les Etats-Unis et le commandement de l’Otan, inquiets de voir le chaos afghan nourrir l’instabilité pakistanaise, montrent du doigt l’Allemagne et la France, qui ne s’y engagent pas suffisamment. Malgré la résurgence des talibans qui ont repris en main des régions entières du pays, Berlin vient de refuser catégoriquement d’envoyer plus de soldats dans le sud du pays, tandis que la France n’a pas encore fourni de réponse. En Allemagne, l’opinion est de plus en plus hostile à la présence en Afghanistan de la Bundeswehr, qui y a perdu, depuis la fin 2001, 25 soldats. Même réticence au Canada où les trois partis d’opposition réclament le retrait de leurs 2 500 soldats. En fait, les opinions publiques des pays de l’Otan ne semblent plus croire à la possibilité de gagner cette guerre, l’intervention étrangère ayant débouché sur un échec symbolique et politique peut-être plus spectaculaire qu’en Irak. C’est avec l’aval de l’ONU que l’Otan était intervenue, fin 2001, pour en finir avec le régime des talibans, protecteur d’Al-Qaida. Les Afghans avaient alors bien accueilli les soldats de l’Otan, perçus comme des libérateurs. Mais les Etats-Unis, mobilisés par leur intervention en Irak, ont négligé le «front afghan», détournant vers Bagdad les hommes, les crédits et les moyens nécessaires à la victoire, tandis que les talibans reprenaient le contrôle de nombreuses régions et que la corruption et la culture du pavot prospéraient de nouveau. Pourquoi dans ces conditions soutenir une intervention dont les objectifs sont incertains ? D’autant que le Pakistan voisin, en proie à l’instabilité politique et où la stratégie américaine a été un échec cuisant, fournit à la guérilla un havre et un réservoir de soldats inépuisable …

Sara Daniel