Reportage

Le nouveau sanctuaire libyen

BOMBES, LANCE-ROQUETTES ET TREILLIS

C’est là qu’ils se fournissent en armes et qu’ils préparent leurs attaques: l’ancien pays de Kadhafi est devenu la base arrière des terroristes du Sahel.

Caisses de munitions abandonnées dans le désert à 100 kilomètres au sud de Syrte, en 2011

Selon la presse algérienne, les véhicules utilisés par les terroristes d’In Amenas proviendraient de la Libye voisine. Les gardes-frontières libyens pensaient qu’ils avaient affaire à un cortège d’officiels libyens en visite en Algérie, ce qui expliquerait qu’ils aient laissé les terroristes islamistes passer sans les contrôler.

Le groupe lié à Mokhtar Belmokhtar serait parti de la ville de Ghat, une ville de désert, au sud-ouest de la Libye. Puis il aurait traversé la frontière algéro-libyenne à hauteur de Zarzaitine, avant d’arriver à In Amenas. Selon des sources sécuritaires algériennes les leaders d’Aqmi se rendraient souvent à Ghat pour faire leur marché dans les arsenaux pris par les rebelles libyens durant la chute du régime du colonel Kadhafi. Ils y font le plein de bombes, munitions, lance- roquettes RPG, gilets pare-balles, treillis, et moyens de communication sans fil. Les terroristes d’In Amenas auraient d’ailleurs été vêtus de treillis jaune et brun, comme ceux que les Qataris avaient fournis à l’armée rebelle du Conseil de Transition libyen.
Selon le journal algérien « Djazair News », des rapports des services de renseignement ont confirmé que les leaders d’Al-Qaida au Maghreb islamique avaient tissé, bien avant l’attaque d’In Amenas, des liens avec le groupe extrémiste Ansar al-Charia en Libye, afin de pouvoir y créer une base destinée à frapper les intérêts occidentaux dans la région.

S’il se confirme que les terroristes d’In Amenas ont bien préparé leur opération depuis la Libye (après l’attaque du consulat américain de Benghazi au cours de laquelle l’ambassadeur Christopher Stevens a trouvé la mort, celle du consulat italien, la destruction des églises et les règlements de comptes qui ensanglantent quotidiennement le pays), ce nouveau coup apporterait la confirmation que la désagrégation de la Libye, où des milices surarmées ne reconnaissent aucun pouvoir au gouvernement de Tripoli, menace la région tout entière. L’attaque d’In Amenas et la crise au Mali seraient bien la conséquence du démantèlement du régime libyen. Et l’intervention française au Mali, décidée par François Hollande, la suite inévitable de celle de Nicolas Sarkozy en Libye.

Sara Daniel